Que vaut la place de l'Afrique au G20 ?

La rédaction
14:5211/09/2023, Pazartesi
MAJ: 18/10/2023, Çarşamba
Yeni Şafak
Le Président sud-africain Cyril Ramaphosa et le Premier ministre indien Narendra Modi se serrent la main avant le sommet des dirigeants du G20 à New Delhi, le 9 septembre 2023. Crédit Photo: Ludovic MARIN / POOL / AFP.
Le Président sud-africain Cyril Ramaphosa et le Premier ministre indien Narendra Modi se serrent la main avant le sommet des dirigeants du G20 à New Delhi, le 9 septembre 2023. Crédit Photo: Ludovic MARIN / POOL / AFP.

Le Président indien Narendra Modi a annoncé ce samedi l'intégration de l'Union Africaine (UA) comme nouveau membre du G20, en marge du sommet de l'organisation plurilatérale à New Dehli. Une décision saluée de toutes parts et qui devrait permettre au continent de mieux faire entendre sa voix sur la scène internationale.

"Avec l’approbation de tous, je demande au chef de l’UA de prendre place en tant que membre permanent du G20"
, a déclaré dans son discours d’ouverture le Premier ministre indien Narendra Modi, accueillant le sommet du G20 dans son pays les 9 et 10 septembre. Cette décision est un nouveau tournant dans l'histoire des relations internationales. L'UA formé de 55 pays d'Afrique (dont six suspendus actuellement) rejoint comme "entité-membre" le G20 qui regroupe les 19 Etats les plus puissants de la planète, plus l'Union Européenne, représentant 85% du PIB mondial.

"Nous sommes heureux que l’UA, qui représente le continent à la croissance la plus rapide, obtienne un siège au G20. Cela donnera aux intérêts et perspectives africains une voix et une visibilité au sein de cet organe important"
, s’est félicité dans un communiqué le président kényan, William Ruto.

Cette intégration résulte d'une longue campagne initiée depuis plusieurs années par les leaders africains, désireux de voir l'Afrique mieux intégrée et représentée dans les instances de décision mondiales. Le chef d’État des Comores et président en exercice de l’UA présent au sommet, Azali Assoumani, en parle comme
"l’aboutissement d’un combat de longue haleine"
dans un communiqué officiel. Son prédécesseur, le Président Macky Sall du Sénégal, qui avait porté le combat de l'intégration de l'Afrique au G20 durant sa présidence, évoque lui une
"décision historique"
qui traduit la vision du G20
"d’une gouvernance politique, économique et financière mondiale plus juste"
.

"Shaping the agenda"


Cette décision soutenue depuis plusieurs mois par les leaders mondiaux, allant de Xi Jipping à Emmanuel Macron, en passant par Joe Biden, devrait permettre à l'Afrique de renforcer son influence sur le processus de prise de décision sur des enjeux mondiaux, de participer aussi à l'élaboration de l'agenda international en y mettant les questions qui interpellent le continent. "Shaping the agenda" est un élément de la puissance et de l'influence qui fait défaut à l'Afrique, qui a souvent été reléguée au second plan sur des prises de décisions qui pourtant le concernent directement.


William Rulo qui plaide en faveur d'un nouveau système financier plus compatible avec les enjeux de l'Afrique, a expliqué que ce siège permettra à l'Afrique
"de façonner les décisions du G20 pour garantir la promotion des intérêts du continent"
. Au fond, c'est bien de cela qu'il s'agit. Cette intégration de l'Afrique vise surtout à faire entendre la voix du continent sur des défis majeurs comme le réchauffement climatique, le financement des économies africaines, l'accompagnement dans la recherche de la sécurité alimentaire pour tous, entre autres.

Une nouvelle architecture de l'économie mondiale


En juin dernier déjà lors du Sommet de Paris sur un Nouveau Pacte Financier Mondial, les présidents africains avaient fait valoir l'urgence de mettre en place une nouvelle architecture de l'économie mondiale, pouvant davantage prendre en compte les intérêts et les réalités des économies du Sud. Les institutions comme la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International ont largement été décriées par les leaders et chercheurs africains, qui voient dans leur mode de fonctionnement une certaine vétusté qui n'est pas compatible avec les préoccupations actuelles de l'Afrique et les mutations du système international depuis 1945.


Les préoccupations économiques de l'Afrique aussi sont pour le moment encore insuffisamment prises en compte. Il se pose l'insuffisance des investissements directs étrangers dont l'Afrique ne reçoit que 3% selon la CNUCED. En outre, une tendance à la baisse est observée puisque l'Afrique n'en a reçu que 45 milliards de dollars en 2022 contre 80 milliards de dollars en 2021. Cela pose notamment la question du financement des économies africaines que l'UA devra davantage porter désormais sur la table des leaders du G20.

Dans cette perspective aussi, les modes d'endettement du continent deviennent un sérieux problème. Selon la Banque Mondiale en effet, 20 pays africains sont en situation ou en voie de surendettement.


Renforcer l'inclusivité du G20


Jusqu'à présent, l'Afrique du Sud était le seul pays africain membre du G20. L'intégration de l'Afrique à travers l'UA permettra de renforcer l'inclusivité du groupe par rapport aux pays du Sud. Avec une population de 1,4 milliard d'habitants, l'Afrique se positionne comme un acteur marquant, autant que l'Inde ou la Chine.


Avec en sus un cumul des PIB des 55 pays qui atteint 2 600 milliards d'euros (l'équivalent du PIB de la France), l'Afrique se place au huitième rang des membres du G20. Ce qui avait fait dire au président sénégalais Macky Sall qu'un siège de l'UA au G20 permettrait de
"réparer une injustice"
.

Par
Alioune Aboutalib LÔ

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