La théorie du chaos régional de l'Iran s'effondre

L'Iran et la Türkiye sont deux puissances régionales qui agissent selon la thèse que les deux États peuvent survivre en se protégeant mutuellement. Cet article doit être considéré comme une analyse de la stratégie régionale de l'Iran plutôt que comme une analyse des relations entre la Türkiye et l'Iran.

Chaque pays élabore sa politique étrangère et sa doctrine de sécurité en fonction de sa position géopolitique, de son histoire, de sa géographie, de ses éléments de pouvoir et de sa capacité d'action.

Après la révolution islamique de 1978, l'Iran a adopté la stratégie de "diffusion de la révolution islamique" comme l'aspect le plus important de sa politique révolutionnaire. Alors que le message de l'islam universel était prédominant dans les premières années de la révolution, il s'est mêlé au fil du temps au nationalisme persan et au sectarisme chiite radical et s'est transformé en une idéologie nationale unie à la fierté impériale de la Perse.

Au cours des deux dernières décennies, la politique la plus importante de l'Iran a été de "laisser les pays de la région dans le chaos et la tourmente afin de préserver la sécurité du territoire iranien". L'Iran n'a pas cherché à établir l'ordre en Irak, en Syrie, au Liban et au Yémen. L'Irak a été envahi par les États-Unis et la structure étatique existante a été détruite. De nombreux dirigeants, qui étaient en exil à l'époque de Saddam, ont pris part à la politique irakienne après l'occupation, et cette situation a montré que les États-Unis ont en quelque sorte cédé l'Irak à l'Iran. Toutefois, l'Irak, qui est sous influence iranienne depuis 30 ans, n'a pas été en mesure de mettre en place un ordre étatique permanent.

L'EXEMPLE DE L'IRAK ET LE RÔLE DE LA TÜRKİYE

Dans le cas de l'Irak, le projet de route de développement, le nouveau renforcement des relations turco-irakiennes et la répression du PKK par la Turquie ont renforcé les espoirs de l'Irak de devenir un État unitaire fort. Bien que 60 % de la population irakienne soit chiite, les Irakiens ont aujourd'hui compris que la République islamique d'Iran n'essayait pas d'établir un ordre pour eux.

L'Iran a indirectement salué la présence du PKK en Irak et l'occupation des villes irakiennes par le fléau de DAESH. Les États-Unis ont suivi une politique similaire pour remplacer les zones occupées par DAESH par le PKK, et l'Iran a suivi une politique similaire pour remplir l'armée irakienne de milices chiites. Toutefois, récemment, l'Irak a développé des politiques centrées sur l'avenir de sa propre nation avec des mesures rationnelles.

Lorsque nous avons rendu visite à un ancien vice-ministre iranien des affaires étrangères à Téhéran, il a fait les déclarations suivantes : "Les États-Unis se sont battus avec nous pendant dix ans, ont occupé l'Irak et nous l'ont rendu. Ils ont également occupé l'Afghanistan, l'ennemi juré des chiites. Ces deux pays sont dirigés par des gens qui vivent en exil en Iran".

POLITIQUES DE LA SYRIE ET DE L'IRAN

Lorsque le printemps arabe a commencé, une révolte populaire s'était déclenchée dans le pays du régime d'Hafez al-Assad, l'un des régimes les plus fermés du monde islamique. Alaouites, chrétiens, Turkmènes, Arabes et autres, 90 % de la population étaient opposés au régime d'Assad.

Les États-Unis et les pays occidentaux n'ont pas soutenu une révolution populaire en Syrie. L'Iran, en revanche, a habilement entraîné le processus révolutionnaire dans la violence armée et s'est rangé derrière le régime. Il a également invité la Russie en Syrie, profitant des efforts de la Russie pour atteindre la haute mer, et a retardé le succès de la révolution de dix ans.

L'Iran n'a aucun intérêt à établir un ordre en Syrie et n'a pas permis aux processus de Genève et d'Astana de fonctionner. Si la Syrie passait quarante ans comme cela, elle continuerait à servir la théorie du chaos de l'Iran. L'Iran ne se soucie pas et ne se soucierait pas de la situation de 90 % de la population. Peu importe le nombre de milices, peu importe le nombre de généraux militaires qu'il a introduits dans le système, toutes ses stratégies ont été conçues pour empêcher la Syrie de devenir un État et pour maintenir cet environnement chaotique.

L'EFFONDREMENT DE LA THÉORIE DU CHAOS RÉGIONAL

Le mépris de l'Iran pour les intérêts nationaux et les revendications des populations des pays qu'il a fait entrer dans sa sphère d'influence, ainsi que l'émergence de la Türkiye en tant que bâtisseur d'ordre, ont complètement mis à nu la politique iranienne. L'affaiblissement de l'hégémonie occidentale et le déclin de sa capacité à établir l'ordre est la stratégie de l'Iran qui se nourrit du chaos. D'autre part, la forte volonté du président Erdogan et la préoccupation de la Türkiye non seulement pour ses propres intérêts, mais aussi pour l'avenir de l'Irak, de la Syrie, des nations africaines et des États turcs, ont rendu évidente l'influence de la Türkiye dans la région.

Désormais, l'Iran doit comprendre que la force et la stabilité de ses pays voisins constituent également sa propre stabilité. Je ne sais pas si l'orgueil persan permettra cette transformation.

La Türkiye est un pays qui a une profondeur impériale et qui vit du commerce. La force de la Türkiye soutient directement la stabilisation des pays de la région. Alors que l'histoire, les conditions et les équilibres géopolitiques évoluent, la capacité de la Türkiye à suivre le rythme de ces changements est prometteuse pour la paix et l'ordre dans la région.

Avec les atrocités commises à Gaza, l'humanité a vu dans toute sa nudité que le colonialisme occidental ne lui promet rien d'autre que la mort.

Si l'influence d'Erdoğan et de la Türkiye dans le monde est traitée de manière intensive par le monde universitaire libéré de la lâcheté conservatrice et que son paradigme est renforcé, cette influence deviendra plus immortelle.